L'autre versus de l'histoire d'amour au théâtre est le trio boulevardier ; dans Trafics Amoureux on n'y échappe non pas parce il s'agit d'une histoire entre garçons; mais bien plutôt parce que la relation triangulaire se termine dans le drame, et parce que les héros rencontrent les obstacles que sont la société, la morale mais surtout et avant tout : eux-mêmes.

Dans les dramaturgies des siècles passés, c'étaient les Dieux qui empoignaient les héros pour les jeter dans l'inconnu de leur destinée tragique. Sans vouloir et sans savoir, ils étaient les jouets de forces qu'ils ne pouvaient maîtriser.

Aujourd'hui, il nous reste un moteur tragique : c'est la sexualité ; quand celle-ci n'est pas dans la norme. En effet, on ne choisit pas d'être un "déviant", un "pervers" ou plus simplement de ressentir du désir pour une personne de notre sexe. C'est quelque chose qui nous arrive, sans le vouloir, sans le savoir à la manière d'un héros tragique aux prises avec des forces qu'il ne domine pas.

Dans Trafics Amoureux , les héros cherchent tous à échapper aussi bien au réel qu'à leur identité ; ils tentent de gagner une place, un statut qu'ils ne pourront jamais atteindre : l'adolescent Bobby se perçoit comme une fille, Papo voudrait rejoindre le mode de vie des Yankees de l'American Dream, et Brian se réfugie dans une sexualité virtuelle.

La mise en scène va s'attacher à faire de ces antagonismes les révélateurs d'une société pseudo permissive, mais dans laquelle des sexualités différentes n'ont pas vraiment le droit de cité, et où les marginaux eux-mêmes n'arrivent pas à assumer leur différence.

Dans Trafics Amoureux, on trouve en creux un scénario quasi identique à celui de On ne badine pas avec l'amour (refus de la relation amoureuse qui se solde par une fin violente) et c'est avec l'évidence d'Alfred de Musset que nous raconterons l'histoire des passions qui agissent les trois protagonistes de Trafics Amoureux.

Notre spectacle se donnera à voir comme une tragédie contemporaine, c'est à dire avec du dérisoire grimaçant, du saugrenu, du boulevardier, et surtout beaucoup d'émotion tendre et pudique pour ces trois jeunes homosexuels que la société condamne à vivre dans la marge.

Le décor devrait à la fois rendre compte d'un réel citadin, mais également d'un imaginaire et l'on oscillera entre le virtuel et le réalisme.

Les lumières et le son seront des éléments majeurs de la réalisation scénique.